Sahara L’Union Africaine semble vouloir La nouvelle crise de subjectivité
Sahara : La nouvelle crise de subjectivité de l’Union Africaine
L’Union Africaine semble vouloir « reprendre la main » sur la question du Sahara. Le dernier Rapport de la Présidente de la Commission de l’UA, ainsi que les décisions du Conseil de Paix et de Sécurité de l’UA renforcent la dimension anti-marocaine de l’organisation. Analyse comparée de ces publications avec les textes phares des Nations Unies et rappel de certains faits, volontairement oubliés dans le contenu des deux documents de l’UA. Cette analyse sera remise dans les prochains jours au Bureau de la Présidente de la Commission de l’UA, ainsi qu’à celui du Président du Conseil de Paix et de Sécurité de l’UA.
Par Brahim Fassi Fihri
Président de l'Institut Amadeus
L’Union
Africaine (UA) est considérée, à juste titre, comme l’interlocuteur
privilégié et incontournable de la Communauté Internationale sur
l’ensemble des questions relatives au continent. L’Union a vu ses
prérogatives considérablement s’élargir notamment en matière de maintien
de la paix, de prévention des conflits et de développement économique.
Fort
de cette nouvelle position, le Conseil de Paix et de Sécurité (CPS) de
l’UA, composé de 15 Etats membres de l’organisation a fait siennes, dans
une décision datée du 27 mars dernier, publiée à l’issue de sa 496eme
réunion consacrée au Sahara, les recommandations du Rapport, sur la même
question, de la Présidente de la Commission de l’UA, publié le même
jour. Cette approche, renforçant le caractère anti-marocain de ces deux
organes de l’UA, démontre très clairement la partialité et l’absence
totale d’objectivité de l’organisation et de ses institutions vis-à-vis
de la question du Sahara.
A
travers le contenu de ces deux documents, la Commission de l’UA se
positionne, plus que jamais depuis le retrait du Maroc de
l’organisation, comme étant juge et partie. Apres plus de 20 ans de
neutralité positive de l’organisation (en faveur évidemment du
Polisario) sur la question du Sahara, une nouvelle
« ambition » de l’UA a émergé lors du Sommet d’Addis-Abeba de janvier
2013, où le Conseil Exécutif de l’UA a demandé « à la Commission de
prendre toutes les mesures nécessaires pour l'organisation d'un
référendum pour l'autodétermination du peuple du Sahara Occidental ».
La
nomination l’année dernière de Joaquim Chissano, connu pour ses
positions pro-Polisario, en tant qu’Envoyé Spécial de la Présidente de
la Commission de l’UA pour le Sahara, doit être considérée comme l’acte
déterminant dans la nouvelle stratégie offensive de l’organisation
panafricaine visant à reprendre la main sur ce dossier. Ignorant, bien
entendu, les vives réactions du Maroc à cette nomination unilatérale -
et notamment la mise au point du Ministère des Affaires Etrangères et de
la Coopération du Royaume, rappelant que « le différend régional au
sujet du Sahara marocain est du ressort exclusif de l'ONU » - le Rapport
de Mme Dlamini-Zuma et le CPS délibèrent sans-gêne sur la question du
Sahara, à travers la mise en avant de propositions et décisions
biaisées, anachroniques, obsolètes et totalement hostiles au Maroc. Si
la crédibilité de l’UA n’est plus à démontrer sur bon nombre de
questions régionales, continentales et globales, les décisions prises
sur le Sahara dans la déclaration du CPS de l’UA démontrent clairement
le soutien total et aveugle des instances de l’organisation aux thèses
du Polisario et de l’Algérie.
Sans
surprise, le contenu du Rapport de Mme Dlamini-Zuma (rédigé également
par le Commissaire à la Paix et à la Sécurité de l’UA, l’ambassadeur
algérien Smail Chargui) et les décisions du CPS, ont été qualifiés
d’ « historiques et de décisifs » par le « Ministre des Affaires
étrangères » du Polisario. Les Présidents Jacob Zuma et Abdelaziz
Bouteflika se sont également « félicités de la décision prise par le
Conseil de paix et de sécurité de l'Union africaine sur la situation au
Sahara occidental», le 30 mars à l’issue d’une rencontre à Alger entre
les deux Chefs d’Etats. S’il est vrai que les décisions et
recommandations contenues dans ces deux documents tranchent avec les
précédentes publications de l’organisation, faut-il pour autant
s’inquiéter de leur teneur à quelques jours de la publication du Rapport
du SG de l’ONU et du vote de la résolution du Conseil de Sécurité sur
le Sahara ?
Il
est indéniable que la position du Maroc est de facto fragilisée au sein
de l’agora africaine par cette nouvelle dynamique « pro-RASD » de la
Commission de l’UA. Les décisions du CPS de l’UA sur le Sahara, telles
que notamment la réactivation - près de 40 ans plus tard - du « Comité ad hoc de
chefs d’Etat et de gouvernement sur le conflit du Sahara occidental »,
la demande d’intervention de Joaquim Chissano lors de la prochaine
réunion du Conseil de Sécurité sur le Sahara, la mise en place d’un
« Groupe international de contact sur le Sahara occidental » et la
réunion au moins deux fois par an du CPS sur la base des recommandations
faites par la Présidente de la Commission de l’UA, doivent être suivies
avec beaucoup d’attention par la Diplomatie marocaine. Il faut
cependant garder à l’esprit que la majorité des décisions,
recommandations, arguments et éléments avancés dans le Rapport de Mme
Dlamini-Zuma sur le Sahara et dans la déclaration du CPS qui s’en est
suivie, restent pour la plupart sans fondements juridiques et sont en
totale contradiction avec les récentes résolutions du Conseil de
Sécurité de l’ONU. Ce même Conseil accusé d’ailleurs de « dérobades » sur la question du Sahara dans l’édition du 1er Avril du journal algérien El Watan.
L’auto-exclusion de l’UA. Le
premier élément de contradiction majeur avec les décisions onusiennes,
contenu dans les deux documents des organes de l’UA, réside dans la
finalité même de ces deux publications et donc de l’approche de l’UA.
Celle-ci, à travers ses documents juridiques phares sur la question du
Sahara, demande « l’intensification des efforts visant à l’organisation
d’un référendum pour permettre au peuple du Territoire de choisir entre
l'option de l'indépendance et celle de l'intégration au Royaume du
Maroc ». Hors aucune résolution du Conseil de Sécurité de l’ONU, ne fait
mention, depuis avril 2007 et la Résolution 1754, à l’organisation d’un
référendum au Sahara Occidental (en dehors de l’appellation et la
nomenclature de la MINURSO).
L’UA,
le CPS et la Présidente de la Commission semblent omettre, comme il est
admis depuis 2007 par le Conseil de Sécurité de l’ONU et par la
Communauté Internationale, que l’autodétermination au Sahara, n’est pas
forcément synonyme d’organisation d’un référendum à deux options,
l’indépendance ou l’intégration. Le culot de
l’organisation panafricaine est d’appeler à l’organisation d’un
référendum au Sahara, alors qu’elle a elle-même préjugé arbitrairement,
non seulement de la tenue du scrutin, mais également de son résultat, en
intégrant la « RASD » au sein de l’OUA puis de l’UA. L’organisation
panafricaine semble avoir oublié que c’est avec la question du Sahara
que la crédibilité de l’OUA a été sérieusement mise à mal, en admettant
en son sein et au déni de toute légalité internationale, une entité ne
pouvant se prévaloir d’aucun des attributs reconnus à un Etat.
Comme
énoncé plus haut, à la lecture du contenu du Rapport de Mme
Dlamini-Zuma, ainsi que des décisions et recommandations du CPS de l’UA
sur le Sahara, les observateurs sont interpellés par l’alignement
effronté de ses publications avec les thèses de l’Algérie et du
Polisario. Comment les organes de l’UA qui prétendent « poursuivre leurs
efforts dans le cadre d’une solution au conflit du Sahara occidental »,
peuvent-ils se faire les porte-paroles systématiques, paragraphe après
paragraphe, d’Alger et du Polisario ?
Dans
son Rapport, Mme Dlamini-Zuma, « attends avec beaucoup d’intérêt » le
renouvellement fin avril du mandat de la MINURSO. Elle ajoute qu’elle
« forme l’espoir que le Conseil de Sécurité de l’ONU saisira cette
occasion pour donner à la MINURSO un mandat en matière de droits de
l'homme, en vue de permettre une surveillance soutenue, indépendante et
impartiale des droits de l'homme ». Dans son sillage, le CPS « encourage
le Conseil de Sécurité à prendre les mesures nécessaires pour donner à
la MINURSO un mandat en matière de droits de l’homme ». Les rédacteurs
de ces deux documents ont sans doute oublié, que l’examen par le Conseil
de Sécurité de la question du Sahara se fait dans le cadre du Chapitre
VI de la charte de l’ONU et que par conséquent le Conseil a toujours
encouragé et soutenu les parties, excluant toute imposition d’une option
ou proposition. Par ailleurs et contrairement aux autres situations où
existe un monitoring au sein des Opérations de maintien de la paix, le
Sahara ne connait pas de violations massives et systématiques des Droits
de l’Homme susceptibles de justifier l’élargissement du mandat de la
MINURSO, ou l’établissement d’un mécanisme international similaire.
Il
faut se souvenir, qu’en avril 2013, le Maroc avait présenté au Conseil
de Sécurité un certain nombre de garanties en matière de protection de
Droits de l’Homme au Sahara. La Résolution 2099 du Conseil
de Sécurité en date du 29 avril 2013, s’était alors félicitée des
mesures prises par le Maroc, en vue du renforcement de la promotion et
la protection des Droits de l’Homme au Sahara, à travers les actions du
Conseil National des Droits de l’Homme (CNDH). La Résolution 2152 du
Conseil de Sécurité du 29 avril 2014 (dernière en date sur la question
du Sahara) se félicite de la même manière des accomplissements du CNDH
au Sahara.
Conscients
de leur incapacité, face à la crédibilité de la démarche marocaine et
du processus supervisé par le CNDH, à continuer à instrumentaliser la
question des Droits de l’Homme au Sahara dans le but d’imposer le
monitoring, Mme Dlamini-Zuma et le CPS, vont beaucoup plus loin. Ils
encouragent, en effet, le SG de l’ONU à procéder à « un examen complet
du cadre fixé en avril 2007 pour le processus de négociation, si aucun
progrès n’est fait avant avril 2015, étant entendu que cet
examen devrait viser à faciliter la tenue rapide d’un référendum pour
l’autodétermination du peuple du Sahara occidental ». Il est, là aussi,
utile de rappeler aux rédacteurs de ces documents ainsi qu’aux organes
de l’UA, que si effectivement Ban Ki-Moon avait, dans son Rapport sur le
Sahara occidental en 2014, recommandé la possibilité de revoir le cadre
de négociation fixé en 2007, en cas d’absence de progrès en avril 2015,
a aucun moment il n’a fait référence au référendum d’autodétermination.
De
plus, Mme Dlamini-Zuma et les membres du CPS, qui disent avoir des
contacts fréquents avec Christopher Ross, semblent avoir occulté le
contenu de la conversation téléphonique du 22 janvier dernier entre le
Roi Mohammed VI et Ban Ki-Moon. Ce dernier avait alors assuré au
Souverain que la MINURSO poursuivra sa mission dans « le respect strict
de son mandat actuel » rejetant de facto toute évolution des paramètres
de négociation actuellement en vigueur.
Compte
tenu de l’inapplicabilité de ces propositions et recommandations au
niveau du Conseil de Sécurité de l’ONU, le Rapport de la Présidente de
la Commission de l’UA, ainsi que le document du CPS sur le Sahara, font
émerger le nouvel axe de bataille de l’Algérie et du Polisario : l’appel
au « boycott des produits des compagnies impliquées dans l’exploitation
illégale des ressources naturelles au Sahara Occidental ». En d’autres
termes, suite « aux plaintes régulières du Polisario », les institutions
de l’UA souhaitent appeler les Etats membres à boycotter les phosphates
marocains. De là à imaginer que le véritable enjeu serait de perturber
le développement de la Vision africaine du Maroc, à travers la mise à
mal de la stratégie de développement de l’Office Chérifien des
Phosphates (OCP) en Afrique, il n’y a qu’un pas.
L’exploitation des phosphates au Sahara, parlons-en. Le Sahara renferme seulement 1,6% des
réserves prouvées du Maroc. Ils sont exploités par l’entreprise
Phosboucraâ, filiale du Groupe OCP. L’effort d’investissement pour
l’exploitation durable des phosphates au Sahara a nécessité l’engagement
d'importantes dépenses d'investissement et d'exploitation de plus de 2
milliards USD sur la période de 1976 à 2010. Sur cette même période,
Phosboucrâa a enregistré des pertes d’exploitation au cours de 27 années
successives. Par ailleurs, l’intégralité des revenus annuels de
Phosboucrâa (estimé à 550 millions USD), est réinvestie dans l’entretien
et le développement de la mine de Boucrâa et dans le renforcement de
l’activité socioé-conomique régionale. De plus, Phosboucrâa est le
premier employeur privé au Sahara. L’entreprise a récemment annoncé le
lancement d’un programme de 250 millions USD sur 10 ans pour favoriser
le développement socio-économique de la région. La stratégie du Groupe
OCP au Sahara, s’insère pleinement dans le « principe de la primauté des
intérêts de ces territoires » - au sujet de l’exploitation ressources
naturelles - énoncé dans le dernier Rapport du Secrétaire Général de
l’ONU sur le Sahara.
La partialité d’une organisation pourtant donnée comme exemple. La
nouvelle tendance des pays membres de l’UA à coordonner et à formuler
des positions communes, au nom de l’Afrique, sur les questions
multilatérales au sein des organisations internationales, fragilise
potentiellement la position du Maroc. L’UA représente très clairement
pour les africains la « Voix de l’Afrique ». Cependant, la Diplomatie
marocaine devrait utiliser le contenu du Rapport de Mme Dlamini-Zuma et
les décisions du CPS sur le Sahara, pour démontrer – si tenter qu’il
faille toujours le faire – l’absence de crédibilité de l’organisation
panafricaine sur la question du Sahara.
Nous
avons vu plus haut, que les récents documents publiés par l’UA sur le
Sahara discréditaient de facto la volonté de l’organisation de se
mouvoir en médiateur, tant sa position était alignée sur les
revendications d’Alger et du Polisario. Certains nous dirons que ce
n’est pas une surprise, compte tenu du tropisme Sahraoui de Mme
Dlamini-Zuma et de M. Chargui. Argument recevable en l’état. Le parti
pris des rédacteurs des documents de l’UA sur le Sahara est donc une
hypothèse de travail qui est admise dès le début de la lecture de ces
deux publications. Par contre ce qui est plus surprenant, et peu
habituel au niveau des organes d’une organisation internationale
respectable, c’est le contenu de mauvaise foi et totalement injustifié
de certains des points présentés dans le Rapport de Mme Dlamini-Zuma.
L’échec
des négociations et du processus de paix y est, en effet, constamment
imputé au Maroc. A titre d’exemple, l’auteur du Rapport précise que le
Plan d’Accord-Cadre (Plan Baker I) a été interrompu « après que le Maroc
ait décidé de mettre un terme à sa participation », sans en expliquer
la raison, laissant croire à une volonté de Maroc de torpiller le
processus. Les spécialistes de la question du Sahara, se souviendront
que le Maroc s’est retiré des discussions en protestation de
l’incorporation dans le Plan Baker I du projet de partition (Plan de
Partage) introduit par le Président Bouteflika, qui prévoyait que le
territoire indépendant soit contigu au Nord-Est de l’Algérie et débouche
au Sud sur l’Atlantique. Jugée légitiment inacceptable par le Maroc,
cette proposition confirmait par ailleurs, l’intention stratégique de
l’Algérie d’isoler le Maroc de son environnement africain, quitte à lui
reconnaître la souveraineté sur la partie Nord-Ouest du Sahara.
Plus
grave encore, Mme Dlamini-Zuma impute également l’échec du Processus de
Manhasset au Maroc, qui selon elle « insistait pour que sa proposition
d’autonomie soit la seule base de négociation ». Pourtant,
la Présidente de la Commission de l’UA doit probablement savoir que
c’est la démission de Peter Van Walsum, après avoir été récusé par
l’Algérie et le Polisario pour avoir dit que l’ « indépendance du Sahara
était irréaliste », qui a conduit à la fin du Processus de discussion
formelle de Manhasset. Je conçois aisément qu’il soit difficile pour Mme
Dlamini-Zuma d’évoquer dans son Rapport sur le Sahara, que
l’indépendance d’un « membre » de l’UA soit irréaliste. Dont act !
Cette fameuse « proposition d’autonomie », citée
par Mme Dlamini-Zuma, est mise dans son Rapport, sur le même pied
d’égalité - voir dénaturée - que la proposition du Polisario présentée
en avril 2007. « Le Front Polisario a proposé la tenue d'un référendum
d'autodétermination, avec des options de vote pour l’intégration,
l’autonomie sous juridiction marocaine ou l'indépendance, alors que le
Maroc a proposé, comme solution, « l'autonomie dans le cadre de la
souveraineté et de l'intégrité territoriale du Maroc » ». Là encore, il
est difficilement concevable que la Présidente de la Commission de l’UA
ne soit pas sans savoir, que depuis la Résolution 1754 d’avril 2007,
l’ensemble des Résolutions du Conseil de Sécurité de l’ONU sur le
Sahara, se félicitent des « efforts sérieux et crédibles faits par le
Maroc pour aller de l’avant vers un règlement » à travers la proposition
marocaine d’autonomie, tout en seulement « prenant note de la
proposition du Front Polisario ». En langage onusien la différence de
traitement entre les deux propositions est flagrante !
Par
ailleurs et dans le même registre, Mme Dlamini-Zuma qui se présente
comme le chantre des Droits de l’Homme au Sahara, ne fait aucunement
référence aux nombreuses appréciations positives par le Conseil de
Sécurité de l’ONU, du rôle joué par le Maroc en matière de protection
des Droits de l’Homme au Sahara. La saisine du CNDH et la coopération
avec les mécanismes onusiens des Droits de l’Homme, ont été, en effet
saluées par le Conseil de Sécurité en avril 2011 et en avril 2012. En
2013 et 2014, ce même Conseil se félicitait des mesures prises par le
CNDH à Dakhla et à Laayoune. Là encore, le lecteur du Rapport peut
supposer que l’absence de ces références s’explique par la volonté des
rédacteurs d’insister sur la nécessité de mise en place d’un monitoring,
en offrant une lecture fragmentée et biaisée.
Le
Rapport de Mme Dlamini-Zuma, renvoie à deux reprises aux entretiens et
échanges que la Présidente de la Commission de l’UA a eu avec des
responsables ou personnalités marocaines. Il est fait dans un premier
temps allusion à une lettre adressée par le Ministre marocain des
Affaires Etrangères, le 6 mai 2013, où ce dernier « a objecté à tout
rôle spécifique de l’UA, soulignant que l’ensemble des acteurs
intéressés, en particulier en Afrique, devraient soutenir et encourager
les efforts du Conseil de sécurité et du Secrétaire général des Nations
unies ». Si la position du Maroc vis-à-vis du rôle de l’UA dans la
résolution de la question du Sahara peut être effectivement résumée
ainsi, il parait fort peu probable que le Ministre marocain (à l’époque
Saad Eddine El Othmani) n’ait pas avancé d’autres arguments mis en avant
par la diplomatie marocaine dans la défense de son intégrité
territoriale. Le traitement de la lettre de M. El Othmani dans le
Rapport de Mme Dlamini-Zuma, est sans doute partiel et incomplet.
Dans
ce même contexte, la Présidente de la Commission de l’UA, annonce dans
son Rapport avoir reçu, « à leur demande », une délégation du Parti
Authenticité et Modernité (PAM). Sur la question du Sahara, elle dit
avoir « insisté sur la nécessité de trouver une solution durable au
conflit qui serait acceptable pour les deux Parties, sur la base de la
légalité internationale, et réitéré la volonté et la disponibilité de
l'UA à aider les Parties à sortir de l'impasse actuelle, dans le cadre
des décisions pertinentes des organes politiques de l'UA ». Là
encore, il est complétement impensable que la délégation marocaine
n’est pas présentée à Mme Dlamini-Zuma ses griefs quant à la gestion de
la question du Sahara par l’UA et donc par ses organes politiques.
Pourtant les rédacteurs du Rapport semblent avoir délibérément choisi de
ne faire aucune référence aux propos des membres de la délégation du
PAM.
Par
ailleurs, la mention dans le Rapport de Mme Dlamini-Zuma du Forum de
Crans Montana à Dakhla, tenu du 12 au 14 mars dernier, peut paraitre
surprenante. Selon elle, « une conférence internationale quelle qu’elle
soit compromet les efforts déployés pour résoudre le conflit ». On est
en droit de se poser légitiment la question en suivante :
En quoi ce Forum, qui a réussi à drainer un nombre très important de
personnalités internationales de premier plan (dont la présence de plus
de 120 pays représentés par des délégations officielles) et donc positionner Dakhla sur la carte des villes africaines d’influence, compromet-il la résolution de ce conflit ?
Enfin,
il m’est impossible d’évoquer la partialité des rédacteurs des
documents des organes de l’UA sur le Sahara, sans invoquer l’omission
grotesque de l’Algérie dans le Rapport de Mme Dlamini-Zuma et dans les
décisions du CPS sur le Sahara. S’il est question deux fois de l’Algérie
dans le Rapport, qualifiée d’ « état voisin » en citant des textes
onusiens, les publications de l’UA ne font nullement mention du rôle
politique et des obligations de l’Algérie fixées par le Conseil de
Sécurité de l’ONU. Les états voisins, tout comme les parties (Maroc et
Polisario) sont pourtant appelés par les deux dernières Résolutions du
CS (RES 2099 d’avril 2013 et RES 2152 d’avril 2014) à « coopérer plus
pleinement avec l’Organisation des Nations Unies et les uns avec les
autres et de s’impliquer plus résolument pour mettre fin à l’impasse
actuelle et aller de l’avant vers une solution politique ».
Plus
grave encore, les deux documents de l’UA ne font aucunement référence
au rôle de l’Algérie dans le processus d’enregistrement des réfugiés
dans les camps de Tindouf, pourtant réclamé par les deux dernières
résolutions du Conseil de Sécurité de l’ONU. Le recensement,
revendication marocaine, permettra, sans aucun doute, d’améliorer les
conditions de vie des populations réfugiées dans les camps. Il est là
encore totalement contradictoire de revendiquer un mécanisme de
monitoring des Droits de l’Homme au Sahara, sans pour autant, réclamer
le recensement et l’enregistrement des populations vivant dans les camps
à l’Est du Mur, et donc en Algérie.
L’hostilité
grandissante des instances de l’UA vis-à-vis du Maroc, l’éparpillement
des décisions et des recommandations présentes dans les deux documents
objets de cette analyse et la volonté de l’Algérie et du Polisario de
positionner leur « combat » sur le terrain des ressources naturelles,
démontrent clairement aujourd’hui leurs difficultés à suivre le rythme
du Maroc. Fort de ses acquis, de ses réformes, de son projet de
régionalisation avancée et de son modèle de développement inclusif
aujourd’hui exporté en Afrique à travers la Vision Royale, le Maroc met
judicieusement en avant ses atouts pour s’imposer comme un leader
africain, porteur d’une réelle stratégie Sud-Sud et Gagnant-Gagnant. Le
Sahara est son point d’ancrage et d’enracinement africain. Il a toujours
été le relais et la zone de transmission culturelle et cultuelle entre
le Royaume et son continent d’appartenance. Le Maroc possède deux
constantes fondamentales : l’attachement viscéral à son Sahara ainsi que
sa vocation africaine irréversible.
Comme
le démontre l’acharnement grandissant des adversaires de notre
intégrité territoriale, le Maroc ne cesse de marquer des points décisifs
dans la résolution définitive de la question du Sahara, à travers une
large autonomie dans le cadre de la souveraineté nationale. Malgré
l’adversité et l’hostilité des instances de l’UA, le Royaume doit
pouvoir, à terme, envisager une stratégie de retour au sein de
l’organisation panafricaine. Le Maroc, fort de ses atouts, se doit
d’être complètement décomplexé vis-à-vis de l’UA. Son Come-back, même
sans être accompagné dans un premier temps par le retrait de la pseudo «
RASD » comme Etat membre de l’Organisation, renforcera de facto la
position du Maroc sur la question du Sahara au sein de l’UA. Il est en
effet plus aisé de « combattre » la présence de la « RASD », mais
également les instances de l’organisation hostiles au Maroc, au cœur de
la structure qu’à l’extérieur des instances africaines.
La
stratégie de « relais » longtemps utilisée par le Maroc, consistant à
s’appuyer sur des pays « amis » membres de l’UA, pour influencer ou
orienter les décisions de l’organisation se révèle de moins en moins
efficace. J’en veux pour preuve la présence au sein du CPS de l’UA de
pays qualifiés d’amis par le Maroc, dont le Niger, la Guinée et la
Gambie, qui n’ont pas voulu, pu ou su apporter d’amendements aux
décisions prises par le CPS sur le Sahara. Si la
pertinence du retrait du Maroc de l’OUA était, il y a 33 ans, justifiée
par des considérations politiques légitimes, la politique de la chaise
vide n’a pas servi la cause du Maroc dans l’agora africaine.
Comme
je l’ai déjà exprimé dans d’autres articles et analyses, le retour du
Maroc à l’UA peut être réalisé de manière progressive, en participant
tout d’abord aux réunions sectorielles et thématiques auxquelles le
Polisario ne participe pas faute de moyens. Le retour du Maroc, même
progressif, au sein des structures de l’organisation africaine est de
plus en plus souhaité par une large majorité des Etats membres de l’UA.
L’expertise du Royaume et sa position d’acteur économique clé sur le
continent appellent de plus en plus de pays africains à dépasser leurs
positions idéologiques pour se positionner sur des considérations
pragmatiques.
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